mercredi 8 juin 2016

Le foot c'est pour les garçons.


Hier, comme à son habitude au moment du goûter à la maison, ma fille me raconte sa journée à l’école : ce qu’elle a fait en classe, ce qu’elle a fait à la récré, la collation qu’elle s’est encore (!!) échangée avec sa copine, la carte Pokémon que son copain lui a promis … et puis, elle me dit, avec des cerises pleines la bouche : « Tu sais, untel m’a dit que j’avais pas le droit de jouer au foot. Que c’était que pour les garçons ».

Ceux qui me connaissent savent que je suis intolérante devant ce genre de réflexions ! Depuis quand le foot n’est que pour les garçons ? On ne lui a jamais parlé de la coupe du monde féminine du foot ? Faut-il un pénis pour taper dans une balle ? et puis … Mais je me reprends, j’inspire profondément et lui demande :
 « - Et tu as répondu quoi ?
- Ben rien, j’ai continué à jouer au foot avec les autres».

Je ne sais pas si c’est l’âge de ma fille et donc de ces camarades (élèves de CE1) mais elle me raconte de plus en plus des réflexions de ce type : un garçon qui fait une fête d’anniversaire Avengers et qui ne veut donc pas inviter les filles car – c’est bonne connu – les Avengers ce n’est QUE pour les garçons, un autre qui refuse de faire un atelier découpage/collage avec des feuilles roses car le rose – c’est bien connu – c’est pour les filles (j’ai pris un malin plaisir à lui faire remarquer que son t-shirt était bien rose, rose pâle peut-être, mais bien rose !!), ou encore l’autre copain de classe qui se moque ouvertement de ma fille parce qu’elle portait un t-shirt Star Wars avec des Stormtroopers et que c’est bien connu, Star Wars ce n’est que pour les garçons.

Mais d’où leur vient cette idée, si tôt dans leur vie, que Star Wars, Avengers c’est pour les garçons, et que le rose c’est pour les filles ? A quel moment se forment ce genre d’idées ? Est-ce la faute des parents, des fabriquants des jouets, de l’école ou celle de la société en général ? Véhiculons-nous-mêmes des stéréotypes au quotidien sans nous en rendre compte ?

Soupir.

Prenez l’exemple de cette conférence dont j’ai vu l’affiche passer la semaine dernière. Une conférence qui invite les « mamans » pour leur donner conseils, outils, techniques pour soutenir leurs enfants qui passent le Bac. Et les papas dans tout ça ? Ils n’ont pas de rôle à jouer ? Réponse de l’organisme – dont je tairai le nom - : « Les mamans sont les plus stressées pendant la période du bac, le transfert du stress peut se faire plus facilement de la maman à son enfant. Les papas gèrent mieux leur stress face à ces situations ». Seriously ? 



Le même semaine, une autre conférence organisée par ce même organisme sur l’industrie à l’ère du digital ou quelque chose de ce genre (c’est bien connu, mon petit cerveau de femme ne peut appréhender ce genre de problématiques) : table ronde avec 4 invités hommes et un modérateur. Où sont les femmes ? Tout comme le grand philosophe Patric Juvet, j’attends toujours la réponse.

Un autre exemple criant de vérité, tout aussi inquiétant car venant d’une école de maternelle qui devrait donner l'exemple aux enfants dès leur plus jeune âge. Cette école envoie un message, un email, aux « messieurs », aux « papas » des enfants de l’école pour solliciter leur aide afin de réaliser le montage du podium en vue de la fête de fin d’année. Réponse brillante d’une des mamans: «Désolée, chez nous les garçons sont à la cuisine et les femmes montent les meubles. On ne vous sera d’aucune utilité cette année ! »

Le pire là-dedans ? C’est quand on met le doigt sur des scènes de sexisme ordinaire et que la personne en face balaye tout cela d’un revers de sa main. Cela peut-être un homme mais aussi des femmes. Et j’avoue que cela m’affecte bien plus que si c’étaient des hommes.

Si nous, entre femmes, nous ne sommes pas capables de relever ces actes de sexisme ordinaire à notre égard, comment inculquer l’égalité à nos enfants ? Comment apprendre à nos garçons à respecter les filles, et les femmes qu’elles seront plus tard ? Comment expliquer à nos filles, qu’elles ne sont pas limitées par leur organe génital ? Que si elle a envie d’être charpentière ou footballeuse, ou astronaute ou que sais-je c’est elle qui décide, que ce sont ses compétences qui décident et non la place que les autres veulent lui donner dans la société ?

Le problème avec le sexisme ordinaire, c'est qu'il est tellement ancré dans les esprits, dans les habitudes, qu’il devient inconscient. Et c’est souvent dans nos échanges au quotidien, ceux de nos enfants avec leurs camarades, mais aussi en entreprise, dans la rue ou à la télévision qu’il se pratique, au vu et au su de tous. Et les exemples que j’ai cités ne représentent que le 1% de ce que j’ai vécu ou de ce que d’autres ont vécu.

Ce sexisme ordinaire, inconscient, est bien ancré dans chacun de nous, et je m’inclus dedans bien entendu. Je me surprends parfois à juger de l’apparence vestimentaire d’une interlocutrice dans le milieu professionnel alors que je ne le fais pas automatiquement avec un interlocuteur. Je me surprends parfois à me demander mais comment fait untelle pour s’occuper de sa famille vu les déplacements qu’elle fait, et jamais, jamais, je me pose la question quand il s’agit d’un homme.

Comment donner l’exemple moi-même ? Comment éviter à ma fille d’assimiler les préjugés ou de perpétuer des schémas qui renforcent les clichés ?  Et si pour commencer, on ne se taisait plus et qu'on montrait du doigt ces actes de sexisme ordinaires, à chaque fois qu'elles se produisent devant nos yeux, qu'on soit homme ou femme, fille ou garçon? Car, et je le crois très fort, on a tous un rôle à jouer.


9 commentaires:

  1. Lundi, c'était l'anniversaire de MC, on lui a offert (entre autre) une boîte de Playmobiles chevaliers. Sa réaction en ouvrant la boîte "HA NON!!! Mais c'est nul ce cadeau, c'est pour les GARCONS ça!!!!"
    J'ai été très choquée et peinée que ma fille ait une réaction de ce style. J'aurais compris qu'elle n'aime pas (on a pu se planter) mais sa logique m'a interloqué... Nous avons un discours très égalitariste, Mouflette a été élevée dans l'idée que filles et garçons sont égaux et elle tient désormais un discours ouvert et censé à ce sujet. Comment sa petite soeur peut être autant à côté de la plaque en évoluant dans un environnement si loin des clichés?
    Je n'ai pas le sentiment que son école promeuve les stéréotypes... Je ne sais pas où elle est allée chercher cela et ça me fait me poser beaucoup de question sur la société actuelle, notre rôle à jouer dans son éducation, etc, etc...

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    1. C'est vrai que ça nous perturbe quand on voit nos enfants "sortir" du schéma qu'on pense leur avoir inculqué. Elle a peut-être entendu cela chez ses camarades de classe? Mais je dirais c'est une belle opportunité pour renforcer le discours :) Happy Birthday à ta miss !

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  2. Chez nous aussi, on essaye de leur montrer sur les filles peuvent jouer au foot, les garçons porter du rose, avoir une peinture bleue dans un chambre mixte...

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  3. Comme toi, je ne sais pas où mes enfants vont chercher ces stereotypes qu'ils me ressortent pourtant, alors qu' la maison il nous semble tout faire pour ne pas les véhiculer...

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    1. Moi je le sais : à la télé, au cinéma, dans les magazines, sur les affiches dans la rue, dans les rayons des supermarchés, des librairies, des magasins de jouets... dans la bouche des camarades de classe aussi et, malheureusement parfois aussi dans celle des profs... C'est hélas un combat qui va bien au-delà de la maison !

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  4. Cette question me touche et je trouve que tu en parles bien ! Difficile de donner le change quand tous les petits copains s'y mettent !

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  5. Hélas, même si on essaie d'inculquer à nos enfants que le rose n'est pas une couleur "de fille", que les garçons peuvent jouer à la poupée, ils seront vite rattrapé par leurs petit-e-s camarades d'école et certains adultes...
    Il est donc important, comme tu le soulignes, d'agir au quotidien et d'interroger les personnes qui ont ces comportements sexistes.
    J'aime beaucoup cet article, bravo !

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  6. J'aurais pu écrire le même article. Dès la première année de maternelle, un garçon a dit à ma fille qu'elle ne pouvait pas aimer Buzz l'Eclair.
    Et pas plus tard qu'hier, un autre garçon lui a dit qu'elle n'avait "pas le droit de regarder le foot ce soir, même si [son] père regarde." J'ai dit à ma fille de bien lui dire lundi matin que non seulement elle a regardé, mais que tout son immeuble est venu voir le match projeté sur le mur de NOTRE terrasse (je déteste le foot, mais j'ai des principes).

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